Musée de Cluny

Paris antique

Maquette de Lutèce au Haut Empire (Ier- IIIe s )

musée Carnavalet

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Les thermes du Nord

Plan des thermes du Nord

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Le pilier des Nautes

par Claudine Guary

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C’est un monument d’une grande importance parce qu’il évoque à la fois la religion et la culture gallo-romaines au Ier siècle de notre ère et parce qu’il reflète la prospérité de Lutèce après la conquête.
Il s’agit d’un ensemble de blocs cubiques de tailles à peu près semblables dont on a longtemps pensé qu’ils étaient superposés (6m au total), montés sans doute sur un socle et supposés soutenir une statue. D’où le terme de « pilier ». Aujourd’hui les archéologues penchent plutôt pour un ensemble formant autel.
Il a été découvert en 1710 à Notre-Dame lors des fouilles entreprises pour la réalisation des vœux de Louis XIII. Il avait été utilisé en réemploi dans des murs du Bas-Empire. A l’époque de son exhumation il a suscité curiosité et questions sur la période gauloise que l’on connaissait encore très mal.
Il comporte une dédicace à l’empereur Tibère ce qui permet de le dater (règne de 14 à 37) et à Jupiter « très bon très grand ».
Les différentes faces du pilier montrent en bas-relief des représentations de dieux celtes associés à des dieux du panthéon gréco-romain. La figuration de dieux gaulois est exceptionnelle car ceux-ci ne sont pas représentés avant la conquête, à l’Age du Fer et que leur nom y est inscrit en caractères latins. Sur certaines faces, dieux gréco-romains et dieux gaulois sont associés mais sans nom ; il est difficile de les reconnaître car souvent leur association est variable chez les Gallo-romains.
Pour les divinités gauloises,
en général liées aux forces naturelles et animales :
Smertrios, vainqueur des monstres. Ici il occit un serpent.
Esus, ici en bûcheron. Pour les auteurs latins il serait responsable de sacrifices humains.
Cernunnos, un des plus connus. Dieu aux cornes de cervidés, ici avec des oreilles animales et des torques accrochés aux cornes.
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Dieu souterrain et dieu des mines.
Tarvos le taureau avec trois grues sur le dos. C’est plus un héros qu’un dieu. On le retrouve plus tard dans la mythologie irlandaise.
Pour les divinités romaines,
certaines sont nommées. On trouve Jupiter (avec la foudre) Pollux, Vulcain, Mars, Mercure et des déesses interchangeables, Vénus (avec un miroir), Minerve, Junon, Fortuna ou Cérès, peut être des déesses gauloises Boudana ou Rosmerta,
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On y voit aussi des personnages armés certains probablement sur un bateau donc il s’agit de nautes.
Les Nautes étaient une confrérie d’armateurs chez les Parisii.
Ils contrôlaient le trafic commercial sur la Seine et ses affluents navigables. Ils sont très influents dès le Ier siècle, utilisent des pièces d’or (statères) pour leurs échanges et reçoivent des Romains le droit d’être armés quelques temps après la conquête ce qui montre leur bonne coopération avec Rome. Au II-IIIe s  s. ils offriront à Lutèce une partie des thermes du Nord (cf. les retombées des voûtes du frigidarium ornées de proues de navires marchands). Le port à l’époque devait se trouver sur la rive Nord (port de Saint-Landry au Moyen Age).
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L’ensemble témoigne donc de l’assimilation rapide des Parisii à la civilisation romaine.
La religion présentée ici est un syncrétisme tardif encouragé par les Romains qui souhaitaient écarter les druides de la pratique religieuse gauloise. Auguste et Tibère ont interdit aux citoyens d’assister à des cérémonies druidiques. Les auteurs latins insistaient d’ailleurs sciemment sur le côté sanguinaire et barbare de ces coutumes. En revanche ils ne voyaient pas d’inconvénient à garder des dieux gaulois. Inversement les Nautes affichent leur romanité en adoptant des dieux.
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Les nautes sont armés

 

 

 

 

 

 

La table de Peutinger

Vous pouvez la consulter , faire des voyages en utilisant ce plan avec les noms  en latin et leur transcription

avec :

http://www.euratlas.net/cartogra/peutinger/fr_index.html

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La Campanie : on voit Pompei, Stabies ,Oplontis , villes romaines qui n’étaient pas connues au Moyen Âge, détruites par le Vésuve en 79.

Les vitraux et les émaux du Musée de Cluny

par Elisabeth Gautier images-2

 

Les vitraux prennent leur plein essor avec l’architecture gothique qui permet grâce à des avancées architecturales (arcs boutants, armatures de métal) de dématérialiser la paroi des églises.

Ce développement va de pair avec des motifs spirituels : «  La lumière est un élément central de la création divine ».

UnknownLeurs décors sont conçus selon de véritables programmes, construits autour de thèmes choisis par le prince, l’abbé, l’évêque, mais rien n’est laissé au hasard ni au seul souci décoratif …

Les vitraux de la Sainte Chapelle qui ont été déposés au musée de Cluny, pour certains, datent de la période de la construction de la Chapelle : 1243/1248, d’autres sont antérieurs et étaient en remploi dans cet édifice. Ils ont été déposés au musée en 1859 pour les protéger des intempéries auxquelles ils étaient exposés.

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La Sainte Chapelle, « reliquaire géant », commandée par Louis IX, était destinée à accueillir les reliques de la passion du Christ. Elle comporte 700m2 de vitraux répartis sur 15 baies de 15m de hauteur, selon un programme basé sur l’ancien testament et la passion du Christ.

D’autres vitraux sont exposés provenant de la collégiale de Troyes, de la basilique de Saint-Denis ou de la vallée du Rhin.

Au premier étage des vitraux plus tardifs datant de 1500 environ, permettent de voir l’évolution dans le travail du verrier : expression des visages par la grisaille, raffinement des coloris, foisonnement des détails, utilisation de verres rayées (dits vénitiens).

Le musée expose également un des rares exemples de vitrail civil : « Les joueurs d’échecs ». Il date de 1450 et vient de Lyon. Il est réalisé en grisaille et jaune d’argent. Au début de la période médiévale, l’art du vitrail est uniquement destiné aux lieux de culte ; puis le développement d’une bourgeoisie marchande va permettre de faire entrer les objets d’art dans les foyers (vitrail, reliquaires, émaux etc.)images-1

Technique du vitrail 

Le peintre verrier dessine son sujet sur carton aux mesures de la pièce à poser. Il peut faire aussi appel à un peintre pour le motif. Chaque panneau ne dépasse pas 1m2, et est articulé à ses voisins par des armatures métalliques appelées barlotières. Le verre plat, teinté dans la masse, est découpé par un fer chauffé au rouge, les bords sont affinés par un grugeoir (le diamant n’apparaît qu’à la fin du XVIe s.) chaque pièce est enchâssée dans une âme de plomb. La grisaille qui permet le dessin sur le verre est obtenue par un mélange d’oxyde de cuivre ou de fer de verre pilé et de gomme arabique, déposée sur le verre avant cuisson.

 

 

 

Les reliquaires et les émaux de Limoges

images-4Le culte des reliques remonte au temps des premiers martyrs. Il se développe considérablement au cours de la période médiévale. Les reliques des saints et martyrs sont l’objet d’une grande dévotion pour obtenir une guérison, une bonne récolte, le pardon des fautes etc. Elles sortent parfois de leur lieu de culte au cours de processions.

Leur prestige est fonction de leur origine : les reliques de la passion du Christ, de la vierge, ou des saints sont les plus précieuses ; viennent ensuite les reliques secondaires (vêtements ou objets ayant été au contact des saints ou martyrs) et enfin les reliques représentatives (toute substance ayant été au contact du corps du saint : cailloux du Jourdain, pierres du calvaire etc.).

Ce sont les reliques qui attirent les pèlerins vers les grands centres tels que Jérusalem, Rome, Compostelle…

Mais tout le monde ne peut pas s’engager dans de tels voyages : il faut alors quitter les travaux de la terre pour de longs mois, laisser sa famille ou son travail, et les chemins sont loin d’être surs …En revanche les pèUnknown-3lerinages de proximité sont infiniment nombreux, les reliques étant présentes dans de multiples églises ou chapelles.

La forme des reliquaires est variable ; elle va du sarcophage sur lequel sera bâti un édifice, au simple petit coffret plus ou moins ouvragé. Elle peut prendre la forme de la partie du corps qu’elle contient (doigt, bras, tête etc.) Elle peut également contenir un liquide (le sang d’un saint par exemple) dans une ampoule montée sur une pièce d’orfèvrerie.

Le musée de Cluny présente une collection de reliquaires remarquable, dont certains provenant des ateliers d’émaux de Limoges

Au XIIe siècle, les émaux de Limoges connaissent leur grande période :

La technique de l’émail est moins coûteuse que l’orfèvrerie d’or ou d’argent, le support étant le plus souvent le cuivre. Elle est donc aussi beaucoup moins coûteuse. Elle permet par la vivacité des couleurUnknown-2s et la verve narrative la réalisation d’objets plaisants et en grande quantité. (On connaît une cinquantaine de « châsses de Thomas Becket » plus ou moins identiques faites à Limoges).

Il existe cependant des émaux sur ronde bosse d’or, à partir du XIVe siècle, objets rares et de grand luxe.

Le plus souvent la technique est celle du « champlevé », la plaque de cuivre est creusée, la poudre d’émail est déposée avant cuisson dans les alvéoles ainsi constituées, c’est la méthode la moins chère. L’émail peut être aussi cloisonné : les figures sont dessinées avec un fil de cuivre ou d’or (plus précieux)…Les émaux peuvent également être peints sur une première couche d’émail. Ce procédé apparaît vers les XVe et XVIe siècle.

Abondante et diversifiée, la production comprend toute la gamme des pièces religieuses : croix, retables, pyxides, ciboires reliures de livres sacrés, châsses. Elle se compose aussi de pièces profanes (boîtes aux scènes courtoises).

 

Les tapisseries de la Licorne et de  saint Etienne

L’histoire de saint Etienne par Françoise Soulié

Consultez ce site, celui de l’histoire de saint Etienne, il vous fera bien rire :

http://www.musee-moyenage.fr/media/documents-pdf/dossiers-enseignents/dossier-enseignants-musee-de-cluny-tapisserie-2012.pdf

 

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                                                   Les mules refusent de continuer à porter le corps de saint Etienne

La Dame à la Licorne

par Josette Sauvaget

1 – DÉVELOPPEMENT DE LA TAPISSERIE AUX XIVe et XVe siècles

La confection des tapisseries a connu un essor considérable à partir du XIVe siècle en raison d’une mutation économique. « Le déclin de l’industrie drapière dans les Pays-Bas bourguignons, à partir du XIVè siècle, a laissé des milliers de bras sans emploi. Une reconversion était indispensable qui fut voulue et soutenue par les ducs de Bourgogne désireux, pour le bien de leurs états, d’utiliser des capitaux abondants, une main d’œuvre qualifiée, des teinturiers experts ; la technique de la tapisserie, proche de celle des draps et étoffes diverses, prit donc le relais »

Tous les éléments étaient réunis : volonté et puissance financière, clientèle fortunée et main d’œuvre abondante et qualifiée.

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Pourquoi des tapisseries ?

  • Pour le confort : ces « murs de laine » tempéraient froid et humidité
  • Pour le décor : adaptées aux grandes surfaces murales des châteaux qui comptaient peu d’ouvertures
  • Adaptées au mode de vie des princes : faciles à rouler, à transporter, à installer, à s’adapter aux nouvelles surfaces. MAIS ces transports usent et abiment les tapisseries. Les tapisseries d’église ont mieux résisté car elles étaient rarement roulées et déroulées.
  • Pour marquer la puissance et la richesse des possesseurs.

Qui étaient-ils ? Des princes, des rois, des nobles, de grands ecclésiastiques puis au cours du XVe, la classe des conseillers, des grands marchands.  C’est le cas de la famille Le Viste

  • Pour faire des cadeaux très appréciés
  • Pour faire des investissements : c’est un véritable placement dans une industrie de luxe, encouragée par les princes

La puissance financière des « entrepreneurs » était considérable pour assurer l’achat des matières premières, le travail (environ 2 ans pour une tapisserie) et attendre le paiement des commanditaires.

2 – DÉCOUVERTE DE LA TENTURE COMPOSÉE DES SIX TAPISSERIES DE LA DAME A LA LICORNE

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  • Tenture : ensemble de tapisseries de lisse illustrant différents aspects d’un même thème, différents épisodes d’un cycle et tissées dans un même atelier

En 1814, un historien, J. Joullieton les mentionne lorsqu’il décrit le château de Boussac dans la Vienne. Ensuite, 2 personnages célèbres sont cités :

  • Prosper Mérimée, inspecteur des monuments historiques qui établit un premier rapport en 1841 ou 42, demandant à l’Etat d’acquérir « 6 tapisseries d’inspiration turque ». Longues tractations.
  • George Sand qui fréquentait le château de Boussac connaissait le sous-préfet qui y travaillait et y habitait. Elle eût donc l’occasion de les admirer à plusieurs reprises

Ce sont les écrits de George Sand (parfois fantaisistes – nombre de tapisseries, description des scènes) qui révèlent la tenture au grand public. Son article descriptif dans l’illustration en 1847 est accompagné des dessins précis de son fils.

41 ANS PLUS TARD, en 1882, Edmond du SOMMERARD alors directeur du Musée de Cluny les achète 25 500 francs pour le musée, à la commune de Boussac. Elles sont accrochées en l’état et inaugurées en 1883 par Jules Ferry.

Même si leur état est lamentable, abimées par l’humidité des murs du château (en dépit d’une somme allouée à la commune de Boussac pour les protéger –somme détournée pour un autre usage) et pour 3 d’entre elles remisées en 1853 dans l’hôtel de ville de Boussac attaquées par l’humidité et les rats, tous les visiteurs sont subjugués, éblouis, fascinés, envoutés par le charme des tapisseries.

La présence des croissants innombrables veulent trouver une explication forcément romantique et exotique. « On croyait que la tenture avait été tissée pour le Prince Zizim, fils de Mohammet II et frère de Bajazet, au temps de sa captivité de 1483 à 1488 à Bourganeuf (près du château de Boussac). La jeune fille aurait représenté la dame de ses pensées ».

Cette légende (et d’autres) perdure jusqu’à la fin du XIXè siècle. Il n’en est rien : ces armoiries « de gueules à la bande d’azur chargée de trois croissants montants d’argent »sont les armoiries de la puissante famille lyonnaise Le Viste montée à Paris. Pour preuve, le vitrail commandé en 1532 par Antoine I (le dernier représentant de la lignée) dans l’église Saint-Germain l’Auxerrois où apparaissent ses armes.

3 – L’HERALDIQUE

  • Discipline ayant pour objet la connaissance et l’étude des armoiries

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Joue un rôle important dans la compréhension de la tenture. Elle s’appuie sur des règles très précises : couleurs, éléments, disposition… Comme les armoiries de la famille Le Viste s’en écartent – à la fois pour se démarquer des armoiries de la reine Guenièvre de la Table Ronde (mêmes couleurs et motifs mais disposés dans un ordre contraire aux règles de l’héraldique) et créer une illusion peut-être – les spécialistes voyaient écus et étendards comme des fantaisies, des « turqueries ». La découverte des armes sur le vitrail de St Germain l’Auxerrois est éclairante.

C’est sans doute Jean IV Le Viste, président de la Cour des Aides qui a fait tisser cette tenture. L’héraldique affirme que ce n’est ni pour un mariage ni pour des fiançailles qu’elle l’a été. C’est en l’honneur d’un homme qui veut marquer sa puissance et son désir d’accéder à la noblesse. (armes pleines).

4 – COMMENT LES TAPISSERIES SONT-ELLES ARRIVEES A BOUSSAC DANS LA CREUSE ?

 

Remontons le temps :

Par le jeu des héritages, les tapisseries échoient à Jeanne, fille d’Antoine Le Viste, ensuite à Jeanne de la Roche Aymon qui par son mariage avec François de Rilhac arrivent en 1660 au château de Boussac.

1730, mariage de Louise de Rilhac avec François De Carbonnières. L’héritière, propriétaire du château et des tapisseries disposées dans un décor de boiseries du XVIIIè (donc réputées immeubles par destination) vend château et tenture à la commune de Boussac en 1835. En 1837, la commune cède la propriété au département de la Creuse qui en fait le siège de la sous-préfecture en 1838.

Les recherches actuelles situent la fabrication de la tenture entre 1457 et 1500. Epoque : Louis XI, Charles le Téméraire, début des guerres d’Italie.

C’est une période charnière entre la fin du Moyen Age et la Renaissance.

5 – LES SIX TAPISSERIES

Elles appartiennent au style « mille fleurs » appelé au moyen Age « verdure », aboutissement d’une tendance à la figuration naturaliste qui s’est développée du XIIIe au XVè siècle.

Les fleurs sont représentées avec un grand souci de précision. Rapprochées des herbiers de l’époque, on peut nommer, classer une quarantaine d’espèces appartenant à la flore médiévale. Sur les 6 tapisseries, 19 plantes herbacées différentes sont représentées ainsi que 4 arbres, tous 4 chargés de fruits.

De nombreux petits animaux peuplent la tenture ; certains font partie du quotidien des personnes de cette époque, de l’univers de la chasse, de la ménagerie ou du fantastique. Les animaux comme les plantes sont porteurs d’un langage symbolique

MAIS, ce qu’il faut remarquer ici, c’est la cohabitation pacifique d’animaux habituellement hostiles, sorte d’éden, de monde paisible et réconcilié.

Sur chaque tapisserie, on retrouve le lion et la licorne. Pourquoi ces 2 animaux ?

  • Le lion est très souvent présent en héraldique, symbole de force, de courage et de domination. Rappel de l’origine géographique des Le Viste : La ville de Lyon ?
  • La licorne, animal merveilleux à la dimension poétique dont la corne (en fait la dent du narval) est sensée lutter contre les poisons et combattre l’impuissance masculine (symbole phallique) née de l’imagination humaine depuis l’antiquité. Corps de cheval, tête et sabots de chèvre, corne longue et torsadée, c’est le symbole de la pureté. Selon la légende, elle est forte et rapide. Elle ne peut être capturée qu’avec l’aide d’une jeune vierge sur les genoux de laquelle la licorne vient s’endormir. La licorne, la vitesse. Rappel du nom du commanditaire des tapisseries : Le Viste ?

Unité des 6 tapisseries : Fond rouge avec jeté de branches fleuries, île bleu foncé piquetée de plantes fleuries, multitude d’animaux, présence du lion et de la licorne. L’élément central qui attire l’œil, c’est la Dame.

Sur les 6 tapisseries, c’est toujours une jeune femme svelte, blonde aux yeux bleus, à l’attitude noble MAIS toujours différente par les traits de son visage, soit arrondi faisant penser aux femmes de Botticelli ou allongé au front dégagé, comme dans les portraits de Memmling, les vêtements précieux, les riches bijoux (diadème, troussoir, bracelet, chaine d’or, colliers, pectoraux) et les coiffures variées. Elle est accompagnée à 4 reprises par une Demoiselle plus petite, elle aussi élégante et luxueusement vêtue, parée et coiffée.

Le thème de 5 tapisseries ne laisse pas de doute ; les 5 scènes symbolisent chacune un des cinq sens. La 6e « A mon seul désir » lue maintenant « mon seul désir » les lettres A et I (ou J) encadrant la devise sont considérées comme étant les initiales du commanditaire et du destinataire, a donné lieu à des interprétations variées et contradictoires. Rapprochée d’une autre tenture de 6 tapisseries possédée par le cardinal Erard de la Marck « los sentidos » dont la 6ème comportait une inscription « liberum arbitrium », il apparaît que cette scène peut se comprendre ainsi : la Dame dépose avec soin un collier dans un coffret après s’en être dépouillée. « Mon seul désir » signifie renoncement aux passions que déchaînent en nous les sens mal contrôlés.

On peut remarquer que les couleurs dominantes de la tenture sont celles des armes de la famille Le Viste– rouge, bleu, blanc. Les flammes qui ornent le pavillon représentent-elles les flammes de la passion ?

Les 6 tapisseries dégagent une atmosphère poétique, un sentiment de paix, d’harmonie, de beauté. C’est sans doute ce qui explique la fascination des nombreux visiteurs.

6 – LA VIE DE LA TENTURE

Sans doute tissée fin du XIVe siècle dans un atelier à Bruxelles.

  • « Découverte » dans le château de Boussac en 1842 par Prosper Mérimée : 3 tapisseries sont présentées dans la salle à manger, 3 autres dans le salon.
  • Début de restauration à Aubusson vers 1847
  • Achat pour le Musée de Cluny en 1882
  • Inauguration par Jules Ferry en 1883 en l’état
  • 1890 et 1894 restauration des parties basses manquantes retissées par les Gobelins mais les teintures rouges sont chimiques et de mauvaise qualité et s’affadissent rapidement
  • 1940 à 1944 nettoyage, renchaînage, repiquages pour consolider la tenture là où elle marque des signes de faiblesse
  • Après la guerre, la tenture est présentée seule dans une salle circulaire
  • 1972 – 1974 la tenture voyage au MET à New York et est exposée avec les tentures gardées au MET et au musée des Cloîtres « La chasse à la licorne »
  • 1975 – 1978 Nouveau nettoyage et pose d’une doublure
  • 1992 – changement du système d’accrochage avec des bandes Velcro
  • 2012 – Dépose et examen. Assez bon état mais l’éclairage a fait pâlir les couleurs. Dépoussiérage, nettoyage et lavage, consolidations diverses, changement de doublure (en lin)pour que les tapisseries soient mieux soutenues et mieux tendues. Il apparaît que la présentation sur le mur courbe est nuisible à la tenture.

Pendant les travaux pour réaliser une nouvelle scénographie, la tenture entreprend un voyage au Japon où elle reste exposée 6 mois (en 2012, 2013).

2300 heures de travail plus tard, la tenture est installée dans une salle rectangulaire aux dimensions juste suffisantes pour les 6 tapisseries, dans des conditions de préservation optimum (éclairage, ventilation)

La Dame à la Licorne a retrouvé souplesse, éclat. Elle est encore plus belle sans plis ni déformations.

7 – TECHNIQUE

C’est une affaire de spécialistes, chacun ayant un rôle bien défini.  L’élaboration d’une tapisserie se décompose en 3 opérations :

  • un artiste dessine des « maquettes », c’est-à-dire des compositions plus ou moins précises à petite échelle.
  • Un cartonnier transpose à la grandeur voulue ces maquettes qui deviennent des « cartons ».
  • Les lissiers enfin traduisent ces cartons par des techniques de tissage qui leur sont propres »

Pour les tapisseries faites à l’économie, les 2 premières opérations pouvaient être supprimées et les lissiers utilisaient des silhouettes en nombre chez les cartonniers en les employant à l’endroit, à l’envers, en changeant les détails des vêtements….

Les principaux centres de tissage (métiers de haute ou de basse lisse) se trouvaient à Arras, Lille, Tournai, Bruxelles où de 1418 à 1446, selon une spécialiste, on comptait environ 500 tapissiers. Les marchands étaient de véritables entrepreneurs qui utilisaient une nombreuse main d’œuvre et possédaient des moyens financiers importants.

Ils travaillaient à la commande et avaient en réserve des tapisseries au décor dans l’air du temps, tapisseries profanes avec sujet profane ou religieux et tapisseries de chœur, longues bandes historiées suspendues au-dessus des stalles. L’une d’elle mesure 77 m de long. Elles racontent souvent la vie du saint Patron de l’église et proviennent d’un don de l’évêque. Ses armoiries sont présentes et son portrait apparaît en fin de la tenture.

Au Moyen Age, on tissait la laine essentiellement mais aussi la soie et pour les tapisseries les plus précieuses, les fils d’or et d’argent. Les teinturiers teignaient la laine en utilisant 3 colorants naturels :

  • Rouge à partir de la racine de garance
  • Bleu à partir des feuilles du pastel
  • Jaune à partir de la gaude, une plante à fleurs jaunes, voisine du réséda.

Pour les modelés et les dégradés, les lissiers utilisaient le procédé du battage (interpénétration des couleurs) ou les hachures.

Il semble que l’artiste à l’origine de la tenture de la Dame à la Licorne soit le Maître des Très Petites Heures d’Anne de Bretagne et qu’elle ait été tissée à Bruxelles.

. Documentation vraiment utile à ma découverte :

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  • Connaissance des Arts – hors-série – Le musée de Cluny et ses collections
  • Dossier pédagogique de l’IUFM d’Antony
  • La Dame à la Licorne – Alain Erlande-Brandenburg – Réunion des musées nationaux
  • L’émission « Palettes »

 

 

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